CHAPITRE IV
Le règne du pangermanisme
I. — Allemagne
Pendant que les victoires franco-sardes de 1859 portaient leurs fruits en Allemagne et amenaient notamment l’émancipation des Israélites, la Prusse prenait l’hégémonie dans ce pays. Bismarck, qui remplissait dans la monarchie des Hohenzollern les fonctions de premier ministre, était pourtant un antisémite déterminé. « Je me sens profondément humilié, s’écria-t-il, au Landtag, le 15 juin 1847, à la pensée qu’un Juif puisse être choisi comme représentant de la sainte majesté du Roi. Je suis, je l’avoue, rempli de préjugés à cet égard, je les ai sucés avec le lait. » (1).
Mais, entre 1860 et 1870, cet homme d’Etat n’avait qu’un seul but, l’unité allemande. Au contraire, les conservateurs prussiens, dont il partageait, en général, les doctrines, étaient hostiles à ce projet ; ils craignaient, bien à tort, que sa réalisation n’amenât la destruction des privilèges des Junker . Bismarck dut donc, à cette époque, laisser faire, en ce qui concerne la question religieuse, les libéraux, qui avaient les mêmes visées nationales que lui, mais qui, en outre, réclamaient l’égalité des cultes.
(1) Discours choisis du prince de Bismarck, t. III, p. 64.